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Région urbaine grenobloise... Et maintenant !

Ce texte présente les propositions de Claude Jacquier à la séance du 17 mars 2009 du Conseil de Développement de l’agglomération grenobloise.

Le débat esquissé à partir de la lettre de soutien à la candidature de Grenoble à l’organisation des Jeux Olympiques de 2018 a montré qu’il y avait sans doute besoin de redonner du souffle à une région urbaine grenobloise qui a peut-être trop vécu sur un passé flamboyant et trop espéré en un futur évènement planétaire dont elle ne détenait pas les clés, loin s’en faut. Peut-être est-il temps de revenir sur certains fondamentaux qui ont fait la force de Grenoble dans le passé, une certaine modestie dans les prétentions autour de la seule richesse dont cette région disposait et dispose encore, la valeur du capital humain et social constitué au cours de 150 ans d’immigrations, tout en ne sous-estimant pas ce que les circonstances politiques ont pu lui apporter dans une période extraordinairement faste pour les transferts de financements publics d’origine étatique dans les trente glorieuses, sans commune mesure avec les budgets mobilisés pour les JO de 1968 et bien plus pérennes et donc plus soutenables. On peut certes rechercher des opportunités de type événementiel considérées comme étant à fort effet levier, mais tout cela n’est rien sans le respect et la valorisation des principes fondamentaux qui ont établi les soubassements de cette ville et de cette région urbaine.

Quelques thématiques devraient venir nourrir les travaux et les débats du C2D pendant la durée du mandat, le C2D devant être moins réactif (par rapport aux projets des autres instances) que proactif, c’est-à-dire en capacité d’initier des débats sur les thèmes qui conditionnent l’avenir de cette région. Pour ma part j’en ai repéré cinq :

1 - Promouvoir un vrai programme de développement soutenable pour cette ville et sa région urbaine pour lui permettre d’être une des toutes premières villes européennes de l’écologie.. Le SCOT en ce moment à l’étude pourrait être le vecteur de cette réflexion à condition de ne pas oublier les massifs alentours (Chartreuse et Vercors) qui sont pourtant en interactions permanentes avec notre ville. Pourquoi n’ambitionnerions-nous pas, à cette échelle, de venir communauté urbaine, voir métropole urbaine (rapport Balladur) en nous appuyant sur un programme de coopération avec toutes les communes ce qui nous assurerait des ressources plus pérennes que des projets fondés sur l’évènementiel ? Voilà des défis qui réuniraient la totalité de la diversité des intérêts présents dans la région grenobloise. Voir les initiatives prises en ce moment au sein du SCOT participatif où sont représentés les habitants de toute la grande région grenobloise qui regroupe près de 700 000 habitants

2 - Valoriser un de nos atouts majeurs dans la région grenobloise à savoir l’eau et son cycle (sources, gestion, traitement, assainissement. Rappelons-nous qu’avant d’être une ville dite de montagnes (altitude moyenne de… 235 m), Grenoble a été une ville marquée par l’eau (inondations et endiguements, houille blanche, modernisation des réseaux d’eau à l’époque de Dubedout, corruption dans les années 80-90). A l’heure d’une menace de pénurie d’eau potable à l’échelle planétaire, pénurie qui sera bien plus terrible que la crise énergétique (ne sommes-nous pas faits à 65% d’eau, 90% pour le cerveau), ne serait-il pas opportun de lancer des initiatives en ce domaine (recherche, formation de cadres, innovations, programmes de coopération avec les pays d’origine des immigrants extra-communautaires présents à Grenoble). Qu’avons-nous fait de ce trésor, dilapidé au moment de la grande corruption des années quatre-vingt et dont certains ont été bien seuls à défendre la remunicipalisation à Grenoble ? Qui, au sein de cette région urbaine a été mandaté au 5e Congrès mondial de l’eau qui s’est déroulé en mars 2009 à Istanbul ?

3 - En lien avec cette ressource en eau (cf. houille blanche), initier un programme de recherche autour de la valorisation des énergies dites propres : solaire, la géothermie de moyenne et de grande profondeur et pourquoi pas travailler à la recherche de nouvelles énergies dans la tradition de la houille blanche. Qu’a fait Grenoble de ses laboratoires sur l’électricité et sur les énergies ? Comment n’a-t-on pas inventé ici les nouvelles sources d’énergie (pile à combustible et autres) et les nouveaux moteurs propres ? Incompréhensible ! N’y a-t-il pas à mener une réflexion sur le complexe politico-techno-scientifique grenoblois et sur son efficacité réelle ?

4 - Réfléchir à l’E-activité (télétravail et te télé-activité) en relation avec la question de la mobilité et de la division du travail femme-homme (le genre). Il n’y a pas grand chose dans le contrat d’agglomération sur ce thème, ni d’ailleurs dans le SCOT. On continue de penser dans les schémas d’hier : infrastructures lourdes (marchés des TP) et automobiles, soutenus par une CCI qui n’a, semble-t-il, pas assimilé les enjeux de l’économie de services, de l’immatériel et de la connaissance. C’est comme si à l’époque de l’industrialisation de Grenoble et des vallées ont avait continué à utiliser les chevaux et les diligences. A l’heure des hautes technologies dont Grenoble se dit une des capitales mondiales, continuer de tout miser sur les chevaux vapeur sur terre, sur mer et dans les airs est plus qu’une erreur, c’est une faute.

5 - Enfin, et cela concerne plus particulièrement le domaine qui fait que je siège au C2D au titre de président de l’ODTI, il faut relancer le chantier de l’innovation sociale et multiculturelle, une tradition grenobloise, en insistant sur la dimension du genre toujours oubliée. Grenoble est une ville de migrants, une ville née de l’immigration, immigrations de toutes origines. Au lieu de s’intituler capitale des Alpes, cet accaparement froissant nombre de villes de l’arc alpin, pourquoi n’affirmerions-nous pas plus cette réalité de ville d’immigration. Qu’en fait-on au moment où tous les budgets visant l’intégration et le renforcement du vivre ensemble sont en baisse, que partout, en Europe, on voit ressurgir la xénophobie et le racisme. Souvenons-nous : le fascisme et le génocide ont suivi la crise de 29. En Italie, en Irlande, en Espagne, au Royaume-Uni et même dans les pays scandinaves maintenant, pourtant de forte tradition d’accueil, le pire est à craindre. La guerre de tous contre tous va-t-elle reprendre à l’heure de l’exacerbation des multiples crises qui nous assaillent. Nous avons là un beau et vaste chantier de développement de multiples coopérations, en développant des échanges réciproques de savoirs et de personnes. Ouvrons les jeunes vers l’Europe et vers les pays du pourtour méditerranéen, c’est un facteur de paix durable. A quand un programme de développement d’écoles bilingues dès l’école primaire, voire à la maternelle, partout dans la région urbaine ?

Voir aussi - Claude Jacquier - « Les grandes politiques d’intégration sont en échec »




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